CS 20-11-2007
Hasard du calendrier, au lendemain de l'arrestation et de l'inculpation de Khieu Samphan, Duch était entendu par les juges des Chambres extraordinaires.
Kang Khek Ieu, alias Duch, comparaissait mardi matin devant les magistrats des Chambres extraordinaires afin de plaider pour sa remise en liberté provisoire. Pour la première fois depuis sa création, la cour hybride se réunissait enfin au complet, dans une petite salle d'audience. Avec les arrestations en chaîne, ces dernières semaines, des ex-dirigeants khmers rouges encore en vie, cette audience a contribué à montrer, s'il le fallait, que le tribunal a passé la vitesse supérieure. Aujourd'hui âgé de 64 ans, Duch a été le premier des cinq a être arrêté, le 10 mai 1999, et écroué à la prison militaire de Phnom Penh, avant d'être transféré, en juillet dernier, dans une cellule du tribunal. Il a été alors inculpé de crimes contre l'humanité par les deux juges d'instruction pour son rôle, de 1975 à 1979, en tant que directeur de la prison de Tuol Sleng, S-21, à Phnom Penh, dans laquelle de 14 000 à 16 000 personnes ont transité avant d'être exécutées à l'extérieur de la ville, à Choeung Ek. Duch s'est présenté à la cour vêtu d'un simple polo blanc à manches courtes. Durant quelques minutes, les dizaines de journalistes ont été autorisés à photographier l'accusé. L'évènement était retransmis à l'extérieur sur des postes de télévision devant lesquels une foule compacte se pressait. Parmi les journalistes et observateurs locaux et étrangers, des centaines d'anonymes, venus assister à l'évènement. « Ce moment est historique, s'est exclamé Sin Khor, une dame de 58 ans qui a perdu son mari et deux frères sous le régime génocidaire. Trente ans ont passé mais les événements ne peuvent être effacés. » Huit ans de détention provisoire L'équipe de juristes chargée de la défense de Duch estime qu'il y a eu un défaut de procédure. Ils demandent sa remise en liberté provisoire au motif que la durée de détention de huit ans avant l'inculpation dépasse la durée maximum légale durant laquelle un prévenu peut être incarcéré avant d'être inculpé. En juillet, déjà, la cour avait rejeté une telle demande, arguant qu'elle n'avait pas compétence à statuer sur ce point. Elle avait, de plus, estimé que sa détention actuelle le protégeait d'actes éventuels de revanche de la part de familles de victimes. « C'est un grand jour », a déclaré mardi Peter Foster, le porte-parole du tribunal, expliquant que cette audience allait enfin effacer les critiques estimant que le tribunal ne se formerait jamais. « Les projecteurs sont désormais braqués sur le Cambodge », a-t-il ajouté. Si les télévisions étrangères, CNN et BBC en tête, ont retransmis cette audience en direct, entrecoupée de documentaires sur cette période, au Cambodge, seule la télévision CTN a diffusé une courte partie de l'évènement en direct. Dès 10h30 à l'ouverture de l'audience, un plan fixe montrait les juges assis face à la foule de photographes. Une voix traduisait en français la lecture des actes. Une demi-heure plus tard, une présentatrice est intervenue à l'écran pour s'excuser que la chaîne n'ait pas trouvé de traducteur de langue khmère. Elle a annoncé la fin de la retransmission, assurant que l'audience serait diffusée en différé avec, cette fois-ci, un doublage en cambodgien.
Frédéric Amat
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