jeudi 13 décembre 2007

Les Cambodgiens fêtent le vent à Phnom Penh

 CS 07-12-2007        

 

Un festival de cerfs-volants a eu lieu jeudi dernier dans la capitale.

Au delà de la compétition proprement dite entre 26 villes du Cambodge, ce rendez-vous permet de revenir sur les multiples croyances qui entourent cet objet.

 

Photo : Pring Samrang
  

Par tradition, les Cambodgiens font voler des cerfs-volants au début de la saison sèche, après la récolte du riz des paysans. Cette coutume a pour but d'attirer la bienveillance de Preah Peay, dieu des vents au moment des moissons. « Eau, terre, feu et vent sont des substances nécessaires pour la vie des êtres vivants. Les Khmers les célèbrent annuellement, via de grandes manifestations comme la fête des eaux, le défié des bateaux illuminés sur le Tonle Sap ou le sillon sacré. Ce festival est un autre de ces événements », explique Dek Sarin, directeur du département de développement culturel du ministère de la Culture, lors de la 11ème édition du festival des cerfs-volants (Khlèng). Celui-ci a eu lieu jeudi dernier à Phnom Penh, dans le jardin de Chroy Chanvar, de l'autre côté du fleuve en face du palais royal. 26 villes ont participé à cette rencontre annuelle. Le cerf-volant de Koh Kong a décroché le premier prix, suivi par celui de Siemreap. Phnom Penh, Kep et Kompong Speu, récoltent tous le troisième prix. Les lauréats ont reçu respectivement 300 000, 200 000, et 150 000 riels.

Selon une recherche lancée par le ministère de la Culture, le cerf-volant était utilisé depuis quelque 400 ans avant Jésus-Christ. Son créateur, Thun Chey, un savant khmer, s'opposait aux mauvais traitements infligés aux esclaves. Un jour, le roi l'a fait expulser en Chine. Sur place, son homologue chinois envoie Thun Chey en prison après qu'il eu commis une faute.

Avec du papier, du bambou et du rotin, Thun Chey a fabriqué un cerf-volant avec un arc sonore et l'a fait voler la nuit, au dessus du palais royal. Le bruit était particulier et ressemblait à des pleurs. Le roi chinois n'a pas manqué de s'en inquiéter auprès de ses fonctionnaires. Ils lui ont alors répondu que la sonorité provenait d'un oiseau qui voulait manger les Chinois. Le souverain a ensuite demandé des éclaircissements aux bonzes. Ils lui ont dit qu'il s'agissait d'un esprit venu le punir d'avoir mis en prison un savant cambodgien. Le roi a alors fait rapatrier Thun Chey dans son pays avec drôle d'oiseau.

La cérémonie du cerf-volant a été pratiquée jusqu'à la mort du roi Ang Duong en 1859. Depuis 1994, le ministère de la Culture organise, chaque année, un festival à son effigie. Et pendant ces dix dernières années, le cerf –volant cambodgien a participé 25 fois aux spectacles internationaux, dont 14 en Europe et 11 en Asie. A noter, lors d'un concours international en 2007 en Chine qui réunissait vingt pays et vingt provinces chinoises, le Cambodge a décroché la médaille de bronze, derrière la Chine (or) et la France (argent).

« C'est un grand fierté nationale. Si les étrangers prennent connaissance de notre savoir-faire en la matière, notre art ne disparaîtra jamais. Quand le cerf-volant s'envole, le Cambodge est vraiment en paix », s'enthousiasme Dek Sarin.

De l'avis de Lim Sary, responsable du bureau de développement culturel de Siemreap, pour perpétuer cet héritage, il faut apprendre aux jeunes générations à s'y intéresser.

Le Cambodge compose une vingtaine de formes de cerfs-volants. Khléng Ek ou Khléng Phnong est la plus populaire. « Ek » est l'arc sonore, composé d'une fine lame de rotin fixée à l'avant de l'objet et qui vibre au souffle du vent.

En 2003, le musée des cerfs-volants, situé près du centre culturel national, a ouvert ses portes pour mettre en lumière cet art populaire. Aujourd'hui encore, cet objet tient une place prépondérante dans les croyances cambodgiennes. Si l'un d'entre-eux tombe sur une maison, c'est un signe de malheur. Il faut alors faire venir les bonzes, qui prieront pour faire revenir le bonheur au dessus des têtes des habitants de l'infortunée demeure. Idem, si il n'émet que deux sons, c'est considéré comme de mauvais augure... Par contre, à partir de trois sons, tout va pour le mieux.

 

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