jeudi 12 juillet 2007

Querelles de vieilles pierres entre Cambodge et Thaïlande

Querelles de vieilles pierres entre Cambodge et Thaïlande
LE MONDE | 06.07.07 | 15h49  •  Mis à jour le 06.07.07 | 15h49
(Bangkok, correspondant)
Le temple khmer de Preah Vihear, situé sur la frontière entre la Thaïlande et le Cambodge fait l'objet d'un vif contentieux entre les deux pays. | AFP/PORNCHAI KITTIWONGSAKUL  
AFP/PORNCHAI KITTIWONGSAKUL

Le temple khmer de Preah Vihear, situé sur la frontière entre la Thaïlande et le Cambodge fait l'objet d'un vif contentieux entre les deux pays.


es "vieilles pierres" les plus controversées d'Asie du Sud-Est font à nouveau parler d'elles. Le temple khmer de Preah Vihear, situé sur la frontière entre la Thaïlande et le Cambodge, est revenu ces derniers jours dans une actualité qu'il n'a jamais totalement quittée tant est vif le contentieux concernant son statut exact : temple hindou appartenant à l'ancien royaume d'Angkor ? Ou édifice de style dit "lopburi" pour les Thaïlandais, remontant à l'époque, voici dix siècles, où les souverains khmers régnaient jusqu'au milieu du royaume de Siam et y construisaient, en bâtisseurs illuminés, leurs innombrables cathédrales ?


La question n'a jamais été franchement tranchée entre les deux pays. Elle vient de refaire surface quand l'Unesco, à la demande de la Thaïlande, a décliné, fin juin, de satisfaire à un souhait insistant du Cambodge pour que le temple de Preah Vihear (Phra Wihan en langue thaïe) soit porté sur la liste des sites du Patrimoine mondial.

Indiscutablement de style khmer angkorien, édifié entre les Xe et XIIe siècles, le temple est situé sur un surplomb, à 600 m au-dessus de la plaine du nord cambodgien. Son accès est très malaisé par cette voie, alors qu'il ne pose aucun problème à partir de la Thaïlande. Depuis le XIX e siècle, Bangkok, qui régnait à son tour sur cette partie du Cambodge, reproche à la France d'avoir favorisé le retour du temple dans le giron d'une nation cambodgienne reconstituée sous férule coloniale. La cour de justice internationale de La Haye a jugé, en 1962, en faveur du Cambodge. Mais la pilule de l'histoire postcoloniale n'est jamais vraiment "passée".

FLOU FRONTALIER

La Thaïlande "n'a pas d'objection" envers la demande de Phnom Penh, dit son ministère des affaires étrangères. Mais elle fait observer qu'il faudrait d'abord que la frontière entre les deux pays, sur la ligne de crête de la chaîne des Dangrek, soit officiellement démarquée et que la mise en valeur touristique nécessiterait à tout le moins un plan commun. Ceci plus de dix ans après la fin des conflits du Cambodge qui avaient rendu la zone inaccessible. Le bras culturel des Nations unies a demandé à l'un et à l'autre de procéder à cette opération élémentaire.

Le flou frontalier fait, sur le terrain, le bonheur des uns et des autres. Les touristes doivent s'acquitter d'un droit de visite à la fois auprès des administrations thaïlandaise et cambodgienne. Mais il favorise aussi les risques de dérapage sur fond nationaliste. L'ambassade de Thaïlande au Cambodge a évoqué, devant la communauté thaïlandaise y vivant - surtout des commerçants -, un plan d'évacuation au cas où les choses s'envenimeraient au point que des manifestations contre Bangkok y dégénéreraient. Les intérêts thaïlandais avaient souffert d'émeutes violentes à Phnom Penh, en 2003, à la suite de diverses maladresses diplomatiques.


Francis Deron
Article paru dans l'édition du 07.07.07

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