lundi 21 mai 2007

Les Français peuvent de nouveau adopter

Les Français peuvent de nouveau adopter
CS-17-05-2007

C'est officiel : les Français peuvent de nouveau adopter au Cambodge. L'Agence française de l'adoption et les Amis des enfants du monde sont désormais les deux seuls organismes accrédités pour aider les futurs parents français dans leurs démarches.

Pour Laure de Choiseul, présidente de l’Agence française pour l’adoption (AFA), c’est “une très bonne nouvelle.” En effet, l’Afa vient d’obtenir de la part du ministère de l’Action sociale cambodgien “l’autorisation d’intervenir dans la procédure d’adoption internationale au Royaume du Cambodge.” En clair : les Français peuvent de nouveau adopter des enfants au Cambodge, ce qui n’était plus possible depuis la fermeture de 2003. Une trentaine d’orphelins avaient quand même rejoint l’Hexagone entre 2003 et 2006, mais il s’agissait de régularisations de dossiers ouverts avant 2003. Les parents ne pourront d’ailleurs plus adopter individuellement : ils devront passer par l’Afa ou par Amis des enfants du monde, les deux agences qui ont été accréditées par décret le 11 mai dernier. Ainsi, toutes les demandes devront être envoyées à l’Afa qui les transmettra à l’ambassade de France à Phnom Penh, qui à son tour les confiera au ministère des Affaires étrangères cambodgien. C’est à ce ministère de décider de l’adoption d’enfants cambodgiens par des ressortissants français, et les futurs parents ne pourront se rendre au Cambodge que sur son invitation.

Imbroglio juridique
Mais l’Afa, créée en 2006 pour servir de relais officiel aux parents adoptants dans leurs démarches avec les pays étrangers, s’est déjà attirée les foudres de nombre d’entre eux pour la longueur et le côté hasardeux des démarches. Le 15 mars, le Viêt-nam a aussi été rouvert à l’adoption internationale et l’Afa a dû faire face à un afflux important de dossiers : près de 1 500 en dix jours pour quelques 200 enfants adoptables sur place. Le choix entre les différents couples candidats a été fait au hasard, provoquant le mécontentement des futurs parents. La situation n’est pas la même pour les deux voisins : le Viêt-nam est le premier pays d’origine des enfants adoptés par des Français, alors que le Cambodge n’est même pas sur la liste des 14 premiers pays qui représentent 87% des adoptions internationales. Pourtant, la leçon semble avoir été retenue, et pour ne plus jouer avec les espoirs des adoptants, la prudence est de mise à l’Afa.
Pour 2007, une trentaine d’enfants seulement pourront être proposés à l’adoption, car la période qui s’ouvre avec l’accréditation de l’Afa “est une phase transitoire dans la perspective de la ratification de la Convention de la Haye par le Cambodge” explique encore la présidente. Cette convention vise à réglementer l’adoption internationale, en instaurant la supériorité de l’intérêt de l’enfant, ce qui donne lieu à un contrôle mais aussi à une harmonisation des procédures. Car un vrai imbroglio juridique entoure l’adoption au Cambodge : le code civil n’autorise officiellement que des adoptions par des Cambodgiens. C’est en raison de ces complexités juridiques que les places sont chères : désormais le choix des couples candidats ne se fera plus par hasard, mais par ordre d’arrivée. Les parents potentiels doivent envoyer leur dossier le 22 mai 2007, cachet de la poste faisant foi. Les adoptions d’orphelins cambodgiens par des Français sont entre les mains des facteurs cette année.

“Un petit pays d’adoption”
Contrairement aux idées reçues, le Cambodge est loin d’être une destination privilégiée pour les futurs parents. L’association Enfance, familles et adoption (Efa), qui regroupe 10 000 familles françaises, a produit un rapport en décembre 2006, précédant l’accréditation de l’Afa, qui qualifie le Cambodge de “petit pays d’adoption”. La situation actuelle dans les orphelinats est telle que très peu d’enfants sont adoptables. 204 centres accueillent un total de 8 000 enfants. Parmi eux, seuls 343 s’y trouveraient à la suite d’un abandon.
Traditionnellement, justifie le rapport, “les abandons sont rares au Cambodge, les enfants orphelins étant pris en charge par la famille élargie.” Seuls les centres de nutrition publics et moins d’une dizaine d’orphelinats sont habilités à procéder à des adoptions, et le nombre d’enfants en leur sein a beaucoup diminué depuis la suspension des adoptions avec la France et els Etats-Unis. 80% des petits ont dépassé la limite d’âge légal, fixée à 8 ans. Il ne reste donc plus qu’un nombre très restreint d’enfants disponibles : “de rares bébés, plutôt des enfants de plus de 4 ans de sexe masculin” estime l’Efa. Par ailleurs, les conditions sont d’autant plus défavorables que “très peu d’enfants ont un statut légal clair”.

Adoption contre coopération
Depuis 1991 et les débuts de l’adoption internationale, seuls 3 000 enfants cambodgiens ont été adoptés, toutes nationalités des parents confondues. Les Etats-Unis arrivent en tête avec près de la moitié des dossiers. L’exemple emblématique d’Angelina Jolie et de son fils Maddox adopté en 2001 est révélateur de la primauté américaine. La star a adopté son fils et développé de nombreuses activités humanitaires dans le royaume, ce qui correspond bien aux attentes du gouvernement cambodgien. En résumé : adoption contre coopération, attitude que réfute l’Afa, qui n’a tout simplement pas de budget à cet escient. Dans cette situation concurrentielle, les couples français sont souvent déstabilisés par l’argent que l’on peut leur demander au cours de la procédure d’adoption alors que côté américain, on met la main au porte-monnaie sans rechigner.
Une pension pour l’enfant versée à l’orphelinat et/ou un don sont demandés aux adoptants. Ils se situeraient entre 800 et 900 $ selon le rapport de l’Efa, auxquels il faut rajouter des frais variant de 500 à 10 000 $ requis par la procédure administrative. Enfin, tout semble indiquer que l’ouverture à l’adoption internationale entraîne une augmentation des bébés arrivant dans les orphelinats, ce qui risque de se passer avec l’accréditation de l’Afa. “La situation actuelle n’est pas propice à l’adoption de petits Khmers par les Français” conclut le rapport.

Lorraine de Foucher

L’adoption internationale en chiffres
Une moyenne de 4 000 adoptions internationales a été comptabilisée dans le monde chaque année depuis 2003.
L’Asie est devenue en 2005 le premier continent d’origine des enfants adoptés, devant l’Amérique latine et l’Afrique.
19% des adoptions internationales se font au Viêt-nam, qui est de loin le premier pays d’origine des adoptions internationales.
1 273 enfants ont été adoptés en Asie en 2006.
Depuis 1991, moins de 3 000 enfants ont été adoptés au Cambodge dont 885 par des Français et 1 666 par des Américains.

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